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Dans notre élan de produire un certain nombre d’articles différenciants sur l’horlogerie de collection, nous nous sommes attaqués à des pans entiers de l’histoire de Rolex, Patek Philippe, Audemars Piguet, en présentant avec un angle d’expert, d’amateur, et de collectionneur des références mythiques. Citons parmi nos trophées de chasse, notre « claim to fame » comme diraient les anglo-saxons, l’article le plus lu en langue française sur la Rolex Daytona, la rétrospective complète de la Rolex Daytona , la revue complète des Audemars Piguet Royal Oak Midsize, la Légende de la Rolex Comex, l’histoire de l’Aquanaut, les Rolex Submariner Red… pour citer les plus connus du monde digital.
Nous sommes toujours à l’écoute de vos demandes et de vos commentaires, et sommes arrivés à la conclusion qu’on ne pouvait se prévaloir d’une bibliographie exhaustive en ligne sans couvrir le mythe des mythes, le point de départ de l’histoire de Rolex dans la légende, à savoir la Submariner James Bond… Là encore, la référence 6538 étant tellement riche en anecdotes et développements que cet article ne prétend en rien être exhaustif, nous avons juste souhaité apporter notre propre éclairage, affirmé notre affection pour cette montre mythique, et venir humblement suggérer qu’au-delà de certains « record breakers » aux ventes aux enchères pour des références 6538 (CHF 1,053,697 chez Christie’s à New York en Juin 2018 !, CHF 371,431 chez Antiquorum à Hong Kong en Octobre 2018, …), il reste (encore) des références 6538 sur le marché à des prix abordables pour un état et une configuration très acceptables. Tel est notre propos dans cet article. Encore faut il pouvoir comprendre toutes les nuances entre les différentes 6538…
La référence 6538 est devenue légendaire après avoir fait son apparition dans le James Bond "Dr No", tout comme le Cosmograph Rolex 6239, cadran exotique, au poignet de Paul Newman. Il y a dans les deux cas une avalanche de photos de disponibles sur la toile avec les deux acteurs portant au poignet leur montre « fétiche ». Ces deux montres sont appelées par le nom de leurs propriétaires, ce qui les distingue sensiblement du lot et contribue bien évidemment à la légende…
Une petite différence toutefois, la "Submariner James Bond" correspond à une référence unique, la 6538, alors que la "Daytona Paul Newman" fait référence quant à elle référence à un type de cadran, le cadran exotique. Cela laisse aux collectionneurs le loisir de profiter de sept références sur pas loin de 20 années de production. La 6538, quant à elle, bénéficiera de moins de six années de production (55 - fin 59 environ), ce qui génère beaucoup de son attrait.
Vous l'aurez compris, il est beaucoup moins facile de trouver cette référence sur le marché qu'une Paul Newman, d’autant plus en bon état... C'est la "Submariner" iconique par excellence, mais c'est aussi sans équivoque la plus chère des "Sub" de collection, et la plus recherchée.
Très rapidement, au fil des ans et des records des ventes aux enchères, cette Submariner s’est distinguée du lot de ses descendantes immédiates, à savoir les 5512, 5513, et autres 1680… tout comme elle se distingue de ses prédécesseurs, le modèle 6200 lancé en 1953, ou le modèle 6204 lancé en 1954, ainsi que la 6536/1. La présence de la « Big Crown », évoquée un peu plus bas dans cet article, est très certainement l’un des facteurs déterminants…
Changeons de registre et passons de l'aspect "célébrité" à un aspect plus technique.
La montre est montée sur un boitier de 38 mm, sans épaulement de couronne, autre facteur qui en fait une montre très rare, les épaulements autour de la couronne ayant fait leur apparition sur la référence 5512, en 1959, et ce jusqu'à aujourd'hui.
La couronne de remontage est d'une taille conséquente, le double des autres références (5508 et 6204 équipées de petites couronnes), ce qui lui vaudra l'appellation de "Big Crown", et qui lui donne un cachet fou. La couronne est estampée du logo Rolex et du mot "Brevet". Il n’en faut pas beaucoup plus pour défrayer la chronique et susciter la passion des collectionneurs… Mais le Big Crown n’est très certainement pas tout…
Plusieurs cadrans, suivant les années de production, ont équipé cette montre, faisant de certains modèles de véritables "oiseaux rares" : sans rentrer dans une chronologie aussi précise que certaines manufactures, comme Patek Philippe ou Audemars Piguet, ayant tenu des registres jusqu’à ce jour, nous pouvons distinguer quatre séries de production pour la 6538 et… un certain nombre de cadrans.
Insert | Aluminium noir et gris sans graduation des 15 premières minutes |
Aiguilles | Or grosse seconde (lollipop) |
Cadran | Laqué (laque nitrocellulosique) |
Impression | Or par électrolyse pour le Submariner, le logo et les lignes du haut et rouge pour l’information de profondeur |
Insert | Aluminium noir et gris sans graduation des 15 premières minutes |
Aiguilles | or grosse seconde (lollipop) |
Cadran | Cadran laqué (laque nitrocellulosique) |
Impression | Tout or (gilt) |
Insert | Aluminium noir et gris sans graduation des 15 premières minutes. - Noir et gris, triangle rouge sans graduation des 15 premières minutes. - Noir et gris, triangle rouge avec graduation des 15 premières minutes. |
Aiguilles | Or grosse seconde (lollipop) |
Cadran | Laqué (laque polyuréthane) |
Impression | Or par électrolyse pour le Submariner, le logo et les lignes du haut et impression encre or en surface pour les informations |
Insert | noir et gris, triangle rouge avec graduation des 15 premières minutes. |
Aiguilles | Heures et minutes or et aiguille secondes blanche. |
Cadran | Laqué (laque polyuréthane) |
Impression | Or par électrolyse pour le Submariner, le logo et les lignes du haut et impression argentée en surface pour les informations. |
Sans oublier… les cadrans de remplacement
Laqué "Swiss-t<25" (remplacement Rolex suite aux directives fédérales sur utilisation du radium)
Mat "Swiss-t<25" (cadran mat de remplacement Rolex suite aux directives fédérales sur utilisation du radium).
Tout ceci crée une avalanche d’informations que nous n’espérons pas être mémorisées par les amateurs, ni même tous les professionnels…
Les cadrans les plus rares (et donc les plus chers) restent à ce jour les cadrans spéciaux dits « 3-6-9 » qui ont été produits sur certaines séries, le plus rare étant indubitablement la première série avec impression or accompagnée de l’information de profondeur en rouge.
Nombre de collectionneurs et experts ont tenu des registres dit d’observation concernant les chronologies « exactes » de production des modèles de montres de la marque. D’une part, il n’existe aujourd’hui aucun consensus sur les dates exactes de production de tel ou tel cadran… juste de nombreuses informations qui ont pu être recoupées… et qui parfois se contredisent. Inutile de préciser que ces nombreuses observations n’ont pas à ce jour été confirmées par la manufacture et surtout, elles ne le seront très probablement jamais.
Ajouter à cela le fait que le contrôle de Rolex sur la production internationale et sur les distributeurs agrées était relativement difficile au vu du nombre de montres produites et distribuées. En réalité, il n’était pas rare que certaines montres « dead stock » soient recyclées suite aux envois de pièces de rechange. Un cadran jauni sur une montre produite en 1956 pouvait être changé par un cadran de seconde ou troisième génération sans que la montre ne quitte la boutique, pour être finalement vendue en 1960 voir plus tard !
Pour toutes ces raisons, notre posture est qu’il faut savoir bien se faire conseiller et, très important, privilégier l’état de la montre convoitée plutôt que de donner une importance à des détails non certifiés.
C’est probablement la question que se pose beaucoup de collectionneurs, et une des sources du charme de la montre de collection.
La première laque utilisée pour les cadrans était de la laque nitrocellulosique. Elle avait la propriété de contenir des solvants et donc de sécher très rapidement après application, ce qui permettait une production plus efficace et surtout plus rapide des cadrans. Mais cette laque comportait des inconvénients, le premier étant tout simplement que ce produit est explosif et demande une manipulation très stricte.
Le second, et cela intéressera davantage les collectionneurs, est que ce produit est très peu résistant aux UV, il jaunit donc très rapidement et de façon très prononcée.
Le troisième inconvénient, et non des moindres, est que les solvants contenus dans la nitrocellulose réagissent avec le temps aux changements de températures et à l’hygrométrie. Ceci a pour effet de produire ce que l’on appelle un « faïençage », donc des craquelures. On peut ajouter à cela l’effet dévastateur du radium sur le cadran et, pour le plus grand plaisir (ou la déconvenue) des collectionneurs, nous obtenons sur certains cadrans des résultats plus ou moins appréciables, du plus beau cadran tropical au cadran le plus détruit.
Pour des montres de collection d’un certain âge, il est très difficile d’imaginer que toutes les pièces qui équipent la montre sont des pièces d’origine. Le cadran, valeur déterminante d’une montre en général (que cela soit pour une Rolex, une Patek ou une Audemars Piguet d’ailleurs) n’a pas toujours résisté aux agressions du temps (voir explication ci-dessus).
Encore faut-il distinguer des cadrans de remplacement fournis par Rolex (dans les années 60,70…) aux cadrans de service plus récents qui, eux, ont tendance à réduire sensiblement la valeur de la montre. Si les modèles 3-6-9 ou les "quatre lignes" atteignent aujourd'hui des sommes n'ayant rien à envier aux Daytona Paul Newman, les Submariner 6538 équipées d'un des deux cadrans de service Rolex n'en restent pas moins des collectors très prisés à considérer que les cadrans de service des années 60/70 ont eux-mêmes emmagasiné une certaine patine et sont devenus des collectors à part entière (ndlr : Il en va un peu de même avec les Patek Nautilus référence 3700 qui, lorsqu’équipés de cadran de service « tritium » conservent sensiblement de la valeur !).
Il y a donc, et nous espérons vous avoir convaincu, cadran de service ET cadran de service, et peut être (sûrement) faut-il préférer un cadran de service à un cadran original détérioré ou, pire, (mal) restauré…
Le mouvement de la Submariner 6538 est un 1030 cadencé à une fréquence de 18.000 Alt/h. un mouvement très fiable et très solide, preuve en est les nombreux passages sur la chrono-comparateur de ces mouvements depuis des années... Un énorme avantage pour des montres de collection de plus de 60 ans.
Les modèles ayant survécu aux affres du temps sont aujourd'hui très rares. Montre outil dédiée à la plongée, peu de modèles sont encore aujourd'hui disponibles sur le marché. Fort heureusement, certaines ont été bien entretenues par leurs propriétaires.
La Big Crown est définitivement une montre à collectionner rapidement, avant qu'il n'y en ait plus sur le marché ou que plusieurs ventes à succès en fassent la montre "intouchable", ce qui risque fort d'arriver à un moment ou un autre, comme pour toutes les montres iconiques de la marque.
Evidemment, Sean Connery reste à ce jour le personnage le plus célèbre ayant porté cette montre. Elvis Presley fait lui aussi partie des célébrités appréciant la marque et c'est dans "Girls, Girls, Girls" (Des filles... encore des filles) que nous retrouverons cette montre au cinéma, la même année que "Dr. No"... Pour alimenter la légende, lors du tournage, il avait été convenu de mettre au poignet de l’acteur une Rolex, mais comme la marque Rolex avait prétendument refusé de la sponsoriser, cela serait la Submariner du producteur Albert Broccoli que l’on retrouve à l’écran… Ainsi va la légende ! Une montre qui équipait à l’époque les commandos de la Navy britannique la Submariner réf 6538 est depuis considérée par les collectionneurs comme LA montre de James Bond.
Tout comme Sean Connery, Elvis, « The King », lui aussi, porte sa montre sur un bracelet Nylon. A croire que le bracelet acier n'était pas, quant à lui, très en vogue à l'époque.
Dans un tout autre registre, Chuck Yeager, premier aviateur américain à avoir passé le mur du son et connu pour la GMT-Master à son nom, portait lui aussi cette montre iconique.
1. Se faire conseiller par un expert ou un collectionneur avisé
2. Comme pour toute chose, comparer les sources et les informations disponibles
3. S’assurer que les pièces principales de la montre sont en bon état (boîte, couronne, fond de boîte, aiguilles, cadran)
4. L’état du mouvement doit être inspecté et son fonctionnement vérifié (pièces difficiles à trouver)
5. Regarder l’état général de la montre. Une montre en mauvais état, aussi « originale » soit-elle (et à moins d’être vraiment très rare et introuvable) est toujours un problème. Mieux vaut parier sur une montre en bon état général même si cette dernière présente des remplacements de pièces d’usure. Une 6538 avec un cadran de remplacement en excellent état et présentant une belle patine se revendra toujours mieux qu’un laqué non lisible, sans indexes ou totalement craquelé.
En espérant que ces quelques lignes auront contribué à alimenter votre passion et votre soif d’information. Nous restons à votre disposition pour échanger.
Par Fabrice Guéroux (@FabriceGueroux) et Cyril Derveloy (@CyrilDerveloy_41W)
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